Je te dis que oui

Une exposition de Mathilde Ganancia

Sur une invitation de Sarah Holveck

 

Du 23 octobre au 06 novembre 2021

 

À la base, je pense avoir été appelée en qualité d’observatrice. Je me suis donc rendue sur place, en minibus, et face à la mer, j’ai pu mesurer l'ampleur de la tâche.

 

Muette par contrat, je ne prends part ni aux bavardages météo, ni aux hurlements des enfants. Procédant méthodiquement par zone délimitée, je note toute la complexité et la richesse de ce qu’il s’y passe. Je me projette dans la vie d’une mouette, puis d’une crevette, puis de milliers de poissons aux couleurs et comportements si différents.

 

Epuisée, je m’allonge à même le sable, plate comme une raie. Tout mon corps se laissant aller à cette délicieuse oisiveté, je m’enfonce encore d’un cran.

 

Un tracteur me roule dessus.

 

Il a tout simplement dû rester scotché par le spectacle marin (je ne pense pas qu’il ait été alcoolisé).

 

Je ne me vois donc plus, mais je peux constater que mon corps entier s’est fait mouler de toute part dans du sable mouillé. Une chaleur se propage entre les grains, je ne dois pas être si loin.

 

J’ai bien ri toute seule, ensablée en étoile.

 

Heureusement, ma cage thoracique demeure intacte.

Grâce à la technique de la carpe, j’ai développé une capacité redoutable à rester en apnée. Rien ne presse tant qu’il n’y a pas d’angoisse.

 

Au pire le groupe PLAGE s’en chargera.

 

De toute évidence, ils ont senti que quelque chose ne tournait pas rond. Mais il est difficile d’y voir clair lorsqu’on parle d’un corps entièrement sous terre.

On a ramené du renfort, des plagistes venus d’ailleurs, y compris de lieux paradisiaques, comme Tahiti.

 

Hélas, le public, ne voyant rien, s’agace et déserte le terrain. Il n’y aura donc pas de scoop cet été, déplorent les unes intérieurement, les autres en grimaçant.

 

Je commençais à me voir défiler sous tous les âges de la vie au cœur d’un tourbillon stellaire, quand 100 milliards de tonnes d'eau sont enfin venues me tirer de là. Je me suis alors laissée entraîner, emportant au passage une bonne partie de la plage, au fin fond de cet univers aquatique, tout à fait fantastique.

 

Clac, sauvée.

 

Presque instantanément, je déniche des paillettes, des perles rares et quelques grosses pépites, juste de quoi m’assurer une forme de crédibilité auprès de ma nouvelle équipe sous-marine. Mes talents d’orpailleuse n’ont fait que confirmer mon intérêt pour la recherche, dans des conditions plus stimulantes encore. De fait, statistiquement, la probabilité de trouver un trésor dans ces conditions-là est bien plus élevée.

 

 

Mathilde Ganancia