du 13.05 au 04.06



Vouloir devenir une pomme ( par exemple celle de Cézanne ), ou en déclamer fébrilement l’intention, c’est se perdre dans les jeux d’un réalisme pictural ( à la fin, on voit ce que l’on voit ). Et l’aveu de ses échecs avec ça, et la nécessité d’une peinture au troisième degré pour jouer l’ironie contre l’ironie. Au-delà de ces ruses picturales, quelle attitude pour quelle mode ?
Des peintures comme des toiles frottées, sortes de barres verticales qui coupent l’espace comme des partitions d’un paysage psychologique. Ces intervalles marquent un format restreint à des lignes et une certaine réserve formelle, comme des échantillons de peinture générique qui sapent toute prétention d’une expressivité exacerbée. Une forme de superposition de couches et de gestes, une facture en patchiness pour une peinture à la fois upcyclée et qui panse ses plaies. Le point overlock en zig zag de la couture fait office de finition pour éviter que le tissu ne s’effiloche. Un procédé de fast fashion qui résonne dans les structures de transmission dans lesquelles la peinture circule et s’échange.
La pièce en verre vrillé trouve son origine prosaïque dans ces barres pivotantes répulsives contre les oiseaux devenu gadget décoratif commun des marchés de stations balnéaires françaises, un artisanat d’entertainment. Un devenir immanquablement défini par les modes de consommation, une frénésie appelée par sa vocation à tourner éternellement sur elle-même.
Dans le travail d’Héloïse Chassepot, les valeurs arty, patchwork ou pseudo-ethnique d’une identité à la Desigual sont les codes de la décontraction d’un design populaire, la mise en scène d’une peinture faite d’imbrications. Un arrangement ornemental qui leur garantit une forme d’auto suffisance : les peintures et les objets sont articulés tout en restant confus, actifs dans leur propre champ d’abstraction tout en participant à des dynamiques bien concrètes de mode et de design. Cette patchiness, c’est le sens actif dans lequel ces objets prennent part à cette ruse, dans l’ostentation des motifs ornementaux qui joue contre la sophistication de la peinture et de son institutionnalisation. Quelque chose de funky pour une peinture de prêt-à-porter et pour ne pas avoir à « choisir entre Ingres et Cézanne ».
Paulo Baggi, 2023.
Une exposition de Héloïse Chassepot,
sur invitation de Romain Grateau.
Vernissage le 13 Mai 2023
à partir de 18h30.
Exposition visible du 14 Mai
au 4 juin 2023.